L’Auguste

Il y a des phrases qu’on entend dire par des gens plus âgés que soi lorsqu’on est jeune et auxquelles on ne veut porter attention, pensant qu’on sait tout sur tout.

Jusqu’au jour où on repense à sa mère disant « Attention, tu vas glisser », alors qu’on a les fesses endolories par la chute…

Il y a des gens qui savent avant nous, qui comprennent, et des petites maximes que l’on retient parce qu’elles vous ont marqué, tellement justes de vérité…

Et justement, je me souviens toujours de ce prof de philosophie dont je buvais les paroles et qui nous avait dit un jour, alors que l’une de nos camarades traversait un moment douloureux, que l’Homme pose toujours, en société, cette question de bienséance : « Comment vas-tu ? », sans même attendre autre chose qu’un « Ca va bien, merci ! ». Mais que souvent, non, ça n’allait pas. Qu’il fallait jouer le rôle de la société, au risque de passer pour un déprimé, un empêcheur de tourner en rond, une personne qui ne joue pas le jeu « normal ».

Mais il est un moment aussi où le jeu fait mal, le masque trop rentré dans la peau coupe le visage. Et je n’ai pas envie aujourd’hui, de faire semblant.

Alors, non,  je ne vais pas bien, mais je sais que ça passera. Je sais que certaines choses passeront en tout cas, à défaut d’autres qui ont pris leurs quartiers en moi.

femme clown t(riste

Aujourd’hui, c’est Moi, Sandrine, qui vais vous parler. Pas Miss Plume, pas celle qui vous raconte des histoires. Juste Moi. Si vous me l’accordez, je retire le maquillage blanc de l’Auguste et je me livre un peu.

Parce que parfois, la vie est lourde. Parce qu’elle fait mal, blesse, tranche. Parce qu’il est douloureux de voir sa famille, autrefois unie, qui se consume et qui, elle aussi, met un masque blanc de circonstance.

Parce que le corps fait mal et que je me demandais cette semaine à quand remonte ce dernier jour de ma vie sans douleurs qui tiraillent.

Parce que les maux crient dans la tête. Parce que les douleurs d’avant ne se sont jamais tues. Les loups hurlent la nuit, dans les rêves.

Parce que j’ai peur. De vieillir, de mourir, de les laisser seuls, ces deux êtres que j’ai mis au monde avec tout cet héritage peu glorieux parfois… Héritage lourd par la fragilité que je leur lègue.

Parce que c’est dur de se réveiller chaque matin en se disant qu’on ne sert à rien dans cette société  qui a décidé de faire une sélection des bons et des vilains petits canards et que le canard boiteux, c’est vous.

Parce que je me dis qu’à 40 ans, je n’ai pas réussi à accomplir mes rêves, pourtant pas exigeants, mais que maintenant, il me semble tard pour parcourir le monde, alors que d’aller jusqu’au bout de ma rue est déjà une souffrance à cacher.

Parce que je suis fatiguée de devoir faire semblant, de devoir rentrer dans le moule. Il est lourd ce moule d’une société bien rangée où chacun doit remplir un rôle défini, dire ce qu’on a envie d’entendre, où la vie de l’intérieur se doit d’y rester.

femme clown

Alors non, aujourd’hui, je n’avais pas envie d’être un pseudonyme, mais juste moi et de vous dire que, malgré tout, lorsque le Clown Triste pleure, souvent il le fait sur la scène, devant les gens, la larme gentiment dessinée sur la joue.

Ce Clown aujourd’hui, je vous le présente un peu. Il disparaîtra lorsque viendra le moment de sortir dehors, que j’entendrai le premier « ça va » de ma journée et que docilement, comme chaque jour, je dirai « oui et toi ? », n’attendant rien d’autre qu’un oui, comme tous les jours. Le contre-pitre prendra le dessus pour amuser et se donner un nouveau visage…

Demain sera un autre jour, sans doute plus doux, plus calme, plus aisé à vivre. Mais aujourd’hui, c’est un jour de larmes, celles du passé, du présent, de l’avenir. D’une vie qui parfois part à vau l’eau.

J’en ai, vous en avez, nous en avons tous. Alors que la bienséance voudrait l’enfouir, j’ai décidé de la déterrer cette tristesse, de la mettre au dehors, pour souffler un peu.

J’avais besoin de fendre l’armure. Ne m’en veuillez pas. Partager avec vous est ma thérapie. Vous êtes mon plus beau traitement.

Signature Miss Plume

Publié le 10 juin 2016, dans Mes regrets aussi .., et tagué , , , , , , . Bookmarquez ce permalien. 11 Commentaires.

  1. Je crois qu’il est bon pour nous de laisser tomber nos masques Sandrine, d’oser dire quand çà ne va pas, quand tout va de travers sans qu’on sache pourquoi ni comment changer la donne. La vie est douce et douloureuse en même temps.
    Le corps qui souffre, ça doit être terrible. Et les cases de la société sont moches et inutiles. Trouver son équilibre est un exercice délicat.
    Demain est un autre jour mais aujourd’hui tu as le droit de dire que tu souffres et que tu as mal. C’est humain et courageux.
    Je t’envoie mes plus tendres pensées.

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  2. Très touchée par ton texte ! je ne fais pas semblant de t’écrire des mots d’empathie, tu sais si bien tomber le masque et j’espère que ces mots posés hors de toi t’auront soulagée ! ! j’ai une génération, presque deux de plus que toi ! il me semble que je te comprends…j’adore la plupart de tes écrits : bravo et courage Sandrine ! ! bise, Maï (mina )

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  3. Parfois on a besoin de lâcher un peu de pression pour se sentir plus légère. Je te souhaite tout le courage du monde. Je t’embrasse ❤

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  4. Très touché aussi par ton « cri » du coeur, le tien, en partage. Notre Sandrine a pris une autre « plume » pour exprimer avec ses mots, ses maux et aussi bien des nôtres, ceux qui nous interpellent, nous bousculent, nous désemparent, nous heurtent … nous font parfois souffrir aussi bien mentalement que physiquement. Bel exemple de courage pour « dire » ton désenchantement … qui, je l’espère, n’est que provisoire ! Te dire …. que je te comprends et que chacun(e) passe aussi par ces périodes de remise en question pertinente. « DIRE » c’est humainement digne et ça fait tant de bien. Même du bout du bout du monde, t’encourager à décompresser tout en sachant ce que ma Maman m’avait partagé avant de rejoindre les étoiles … « Il n’est aucun problème humain qui ne puisse trouver sa solution, puisque cette solution est en nous » Alfred Sauvy En pensées avec toi …. non, tu n’es pas seule ! ❤

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  5. ♥ Tenez le coup, et n’ayez jamais peur d’être franche avec nous… Nos failles font parties de nous, et on ne serait pas des personnes aussi sensibles et, disons-le, aussi intéressantes sans elles.
    Ce qui ne rend pas ça plus facile quand on traverse des épreuves. Alors je vous envoie toutes mes pensées ♥
    (Je crois que je vais arrêter de vouvoyer… J’ai tendance à faire ma gamine timide et/ou respectueuse, mais ça met une distance qui, avec certaines personnes qui me touchent particulièrement, commence à me peser. Fin de la parenthèse.)

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